A la question « Pour quelles raisons m’avez-vous choisi comme coach ? », la plupart de mes clients ne savent pas répondre. J’entends souvent « au feeling », « au hasard », « ça s’est joué de peu mais je ne sais pas vous dire pourquoi », …

Quel est donc le mystère qui préside au choix d’une relation ?

« Je suis ton père »

Freud nous donne la réponse : ça s’appelle le transfert. Dans le phénomène de transfert, j’attribue à l’autre une position symbolique, souvent une position d’autorité. Ce qui se joue à l’instant T dans la relation, s’est joué à un autre moment dans mon passé. Le transfert classique « mon manager me fait penser à mon père » en coaching, peut aussi apparaitre sous des formes plus subtiles. Par exemple : le non-verbal de cette personne, aujourd’hui, me ramène à l’attitude de ce professeur qui m’a humilié devant la classe il y a 20 ans. Ou bien : cette personne, que je pense être passive et victime, me rappelle en réalité ce tonton qui subissait les brimades de la famille.

Tout ceci est largement inconscient, et le propre d’un travail thérapeutique est précisément de conscientiser ces réactions pour ne plus (ou moins) les subir inconsciemment.

« Et moi, ton fils ? »

En tant que coach, la compréhension de ce phénomène est fondamentale, d’autant que le transfert engendre un contre-transfert.

La réaction du coach au transfert de son client s’appelle le contre-transfert. Par exemple, de par ma personnalité, mon client pense que je représente une figure d’autorité écrasante, et il va mettre en place une stratégie relationnelle avec moi de type rebelle. Le contre-transfert correspondra alors à ma façon de réagir à ce comportement rebelle, toujours bien sûr en lien avec ce que j’ai vécu dans le passé face à un comportement rebelle.

Et tout ceci fonctionne dans les deux sens : moi, coach, je peux « transférer sur » mon client une figure du passé, et lui-même vivra un contre-transfert en lien avec mon attitude.

Compliqué ? Oui, un peu, surtout que, pour finir, il est possible de penser que toute relation humaine est pilotée par ce phénomène. Dès qu’il y a relation, il y a transfert (et contre-transfert)…

Et maintenant ? Pour faire quoi avec ?

Aidant ? Oui, très. Car prendre conscience de ce phénomène, et l’utiliser, permet d’aller plus loin en coaching. Si le coach arrive à devenir « caisse de résonance » d’un phénomène de transfert, il peut s’en servir pour communiquer dessus et permettre une clarification pour le client.

Les conditions pour ça ? Que le coach ait « travaillé sur lui » afin d’avoir conscience de ses propres réactions de transfert, et qu’il soit ensuite en mesure d’en avoir conscience « à chaud ».

Parallélisons…

Une autre expression est beaucoup utilisée en coaching : « processus parallèle » (ou « reflet systémique »). Cette expression parle d’un autre type de transfert : ce qui se passe entre mon client et moi, se passe aussi dans la situation problématique de mon client, dans sa vraie vie.

Ces processus expliquent bon nombre de blocages ou de défaillances en coaching, et, bien utilisés, sont aussi à la source de nombreux coups de baguette magique en séances. Bien conscientisée et communiquée, la découverte d’un processus parallèle permet de faire un bond dans la compréhension de situations difficiles pour la personne coachée. Quelques processus parallèles sont bien connus de la part des coachs : l’impression de tourner en rond en séance, l’impression de ne plus savoir quoi dire ou de ne plus savoir quoi faire (le « trou »), la prise de position pour le client (ou pour son manager, ou une autre personne), la position de conseil, le fait de vouloir à la place de son client, la montée d’émotions inexplicables, la perte de neutralité, le réveil du sauveteur, …

Si vous cherchez le coté magique du coaching, de mon point de vue il est là : mettre au jour les phénomènes invisibles qui pilotent inconsciemment, afin de s’en servir pour poser un nouveau regard sur les situations.

Comment faire ? C’est « simple » :

  • Réaliser un travail thérapeutique afin de prendre de la distance face à ses sources de transferts et contre-transferts.
  • Poser une conscience particulière sur ce sujet lors des séances : les transferts, contre-transferts, et processus parallèles se manifestent par des réactions corporelles, émotionnelles et comportementales précises.
  • Méta-communiquer sur la relation coach-client, c’est-à-dire parler de ce qui se passe dans la relation et faire faire des liens avec les situations réelles du client, si c’est possible et pertinent.
  • La supervision est l’endroit adapté pour parler de tout ceci, et permet des avancées conséquentes dans sa posture de coach.

 

Petite question au passage et pour terminer : l’intelligence artificielle sera-t-elle capable un jour de détecter et utiliser ces phénomènes ?